« Humanité », ce fut le premier mot qui vint à l’esprit de Bruno Lohezic, directeur de l’établissement, lorsque la question des valeurs de l’ESAT les Ateliers du Pigeon Blanc lui fut posée lors de notre échange.

Structure médico-sociale d’accompagnement par le travail pour les personnes en situation de handicap, l’ESAT Les Ateliers du Pigeon Blanc de Pontivy a su, au travers de ses nombreuses activités diversifiées, devenir un acteur économique et d’insertion essentiel du territoire.

Qu’est-ce qu’un ESAT ?

Anciennement centres d’aide par le travail (CAT), les ESAT (Établissement et Service d’Aide par le Travail) proviennent d’un mouvement lancé dans les années 60 par l’association de familles et de parents Les papillons blancs, alors démunis face aux handicaps de leurs enfants, notamment la déficience intellectuelle et autres troubles psychiques. D’abord centré sur l’hébergement, le support travail est advenu afin de développer l’épanouissement des personnes, leurs compétences et leurs places dans la société.

Créé en 1975, l’ESAT Les Ateliers du Pigeon Blanc fait partie de l’association ADAPEI 56, elle-même étant un maillon de la fédération nationale ANAPEI. Au sein du pôle travail de l’ADAPEI 56, le Pigeon Blanc a pour mission de confier une activité professionnelle à chaque ouvrier de sa structure. « Toutes les personnes qui travaillent à l’ESAT sont considérées comme travailleurs handicapés. Suite à un sondage, ils ont souhaité qu’on les appelle des ouvriers, car leur souhait est d’être considéré comme des personnes au travail, je parlerai donc d’eux comme des ouvriers » nous glisse au début de l’entretien Bruno Lohezic.

Au sein de l’établissement, chaque ouvrier possède des objectifs qui sont identifiés dans un projet individuel adapté pour chacun. Ce projet, renouvelé tous les 2 ans, peut être modifié dès que nécessaire si la personne se sent soit en avance sur ses objectifs, soit au contraire en retrait. « On peut adapter à tout moment, c’est l’un des points forts de notre activité. On a du temps, on se donne du temps. On a ce luxe-là » précise-t-il.

Bien que la structure réponde en partie à une logique « marchande » en étant porteuse de services et de fabrication de produits, les activités de celle-ci peuvent demander un temps de fabrication et de réactions un peu plus important. « On a nécessité de bien faire passer le message à nos clients pour justement garantir des conditions de travail qui soient dignes ». En outre, en se laissant du temps, l’ESAT offre aux ouvriers la possibilité de les accompagner dans les meilleures conditions pour une montée de compétences et une prise en compte des états de santé de chacun.

La valorisation du travail

Aux Ateliers du Pigeon Blanc, 120 ouvriers sont accueillis actuellement, soit à temps partiel soit à temps plein, leur travail est réparti en 4 grandes activités :

Une activité de sous-traitance industrielle. Ce sont des ateliers avec des rythmes adaptés pour chacun permettant d’accueillir des personnes très fatiguées comme en pleine forme. Pesée, gestion de commandes, tri d’archives, lavage de gobelets, etc., les activités de sous-traitance du Pigeon Blanc sont nombreuses et variées. « On a aussi une petite intervention chez un charcutier qui nous accueille 1 fois par mois pour faire du lavage de bocaux et du stickage, cela permet aussi aux ouvriers de s’aérer et de changer de contexte » raconte Bruno Lohezic.

Une activité d’espaces verts, composé de 4 équipes plus une petite équipe en autonomie, ils interviennent sur les sites industriels, auprès des entreprises, des collectivités sur des crèches, hôpitaux, mais aussi auprès des particuliers. « Pour l’anecdote, il y a des personnes âgées qui attendent notre venu avec intérêt, cela leur fait un peu de passage et ils ont l’habitude de préparer un goûter avec de la brioche, des gâteaux, c’est le côté un peu attachant, les équipes sont attachées à ce service, il y a ce petit supplément d’âme qui motive tout le monde ».

Une activité de menuiserie, où l’on fabrique des palettes, du mobilier de jardin sur-mesure, des tables de pique-niques, des bancs… Les activités au sein de l’atelier sont complémentaires, avec un aspect physique pour certaines (palettes) et d’autres nécessitant davantage de précision et de concentration.

Enfin, la dernière activité de l’établissement est la cuisine et la restauration, jusqu’à 130 repas sont réalisés par jour au sein de l’ESAT.

Depuis peu, dans un souci de mieux se faire connaitre et de se faire un réseau, l’établissement accueille aussi des petits déjeuners d’entreprises, « on profite de ces moments pour leur faire la visite de la structure » nous dit son directeur.

Aux yeux de Bruno Lohezic la valorisation du travail des ouvriers est primordiale. « Notre spécificité c’est qu’effectivement on a des ouvriers en situation de handicap, mais on n’est pas dans le misérabilisme, on doit valoriser le travail de nos équipes, parce qu’on a des gens compétents au travail, parce qu’on a la valeur du travail bien fait qui satisfait nos clients. Et ça, c’est une réelle fierté pour nous ». Citant alors pour exemple une visite d’un client à l’ESAT qui a pu voir comment était réalisé son produit. Lors de ce moment, ce dernier a pris la parole pour remercier tout le monde et faire part de sa satisfaction, « il a reconnu et considéré le travail de chacun, on en parle encore et les ouvriers en sont vraiment fiers, ils sont très contents quand on reconnaît leur travail ».

Le difficile passage du milieu protégé au milieu ordinaire

Ne perdant jamais de vue ses objectifs d’insertion et d’inclusion, l’établissement propose des stages de découvertes d’entreprise, ainsi que de la mise à disposition, comme c’est le cas par exemple à la commune de Cléguérec, avec l’un des ouvriers. L’ESAT reste cependant vigilant dans l’intégration vers le milieu dit « ordinaire », « tout le monde n’est pas prêt ou apte à le rejoindre, cela prend du temps, certains se rendent compte que c’est trop compliqué. On ne pousse donc pas forcément vers le milieu ordinaire, on essaye avant tout d’aider à ce que la personne ait une conscience des choses et un avis éclairé ».

Au sein de l’ESAT, le collectif et le vivre ensemble guident chaque action de l’établissement et permettent de créer un environnement bienveillant et respectueux pour chaque travailleur. Comme nous l’explique Bruno Lohezic « c’est l’humain avant tout, on doit partager ça, respecter les personnes au travail, leur donner les meilleures conditions de travail possibles. Accepter le fait que les ouvriers travaillent un peu moins vite que les autres, mais en tout cas, ils travaillent aussi bien voire mieux parfois ».

Et quelles sont donc les actions futures du Pigeon Blanc ?

« À court, moyen et long-terme, on a aussi une envie de mieux se faire connaitre, mieux communiquer, c’est aussi pour cela que j’apprécie notre travail d’aujourd’hui. Car on ignore trop ce qu’il passe dans nos murs, ce qu’on y fait et comment on le fait. »

Avec un passage dans la newsletter du pôle, plus de raison maintenant de ne pas connaitre l’ESAT les Ateliers du Pigeon Blanc.

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